Éditorial : Le Tchad à l’épreuve du nouveau visage du terrorisme sahélien

Le Sahel brûle à nouveau. Au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les offensives du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM) rappellent que la menace terroriste, loin d’avoir reculé, se transforme et se renforce. Et tandis que les capitales sahéliennes se replient sur leurs frontières, le Tchad, pilier historique de la lutte antiterroriste dans le Sahel, se retrouve face à un dilemme stratégique : faut-il continuer comme avant, ou repenser en profondeur sa sécurité nationale et régionale ?

Depuis des années, l’armée tchadienne est saluée pour sa bravoure et son rôle décisif dans les coalitions régionales. Mais les réalités changent : le JNIM avance désormais avec une logique économique, s’imposant dans des zones rurales par la fiscalité, le commerce et la terreur, plutôt que par des batailles ouvertes. Ce « djihad économique » menace d’étendre son influence au-delà du Mali, jusqu’aux zones frontalières du Tchad. La question n’est donc plus seulement militaire, mais politique, sociale et territoriale.

Sur le terrain, les communautés frontalières s’inquiètent de l’absence de l’État. L’insécurité nourrit la pauvreté, et la pauvreté alimente l’insécurité. C’est un cercle vicieux que les opérations militaires, aussi courageuses soient-elles, ne suffiront pas à briser. Le Tchad doit désormais changer de cap en investissant dans la sécurité humaine, dans l’éducation, dans les infrastructures rurales et dans la présence effective de l’administration. Autrement dit, il faut remplacer la peur par la confiance.

Le moment est crucial. Car si le pays reste concentré sur la seule réponse militaire, il risque d’être pris de court par une menace diffuse, insidieuse et idéologique. Le JNIM ne conquiert plus seulement des territoires, il conquiert des esprits.Face à cela, le Tchad doit réinventer sa stratégie sécuritaire. Non pas en se repliant, mais en renforçant la coopération régionale sur de nouvelles bases : intelligence partagée, développement concerté et dialogue communautaire. La stabilité du Sahel ne se jouera pas uniquement sur les champs de bataille, mais dans la capacité des États à redonner espoir à leurs populations.

Aujourd’hui plus que jamais, le Tchad doit se battre pour la paix, autant que pour la sécurité.

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